30.11.08

Fou de Mad Men

Je viens de finir de regarder pour la deuxième fois les 13 épisodes de la première saison de la télésérie américaine Mad Men. Et je crois que c’est ce que j’ai vu de mieux à la télévision.

La série se déroule en 1960, dans une agence de publicité de Madison Avenue à New York. Au départ, on remarque surtout les costumes, les décors et le décalage historique. C’est un monde à la fois étrange et familier. Il y a le sexisme et l’outrageuse domination des hommes sur les femmes. Il y a les cigarettes qu’on fume partout, les cendriers qui débordent et l’alcool qui coule à flot dans les bureaux. Il y a les jeunes qui essaient d’avoir l’air vieux et les enfants qu’on n’attache pas en auto.

Mais cette reconstitution historique n’est pas une fin en soi. C’est un arrière-plan sur lequel se déploie l’essentiel dans une œuvre dramatique: des personnages vivant des situations qui renvoient le téléspectateur à lui-même. Dans ce sens-là, Madman n’est pas du tout une « série d’époque ». C’est simplement une œuvre sur la condition humaine.

Vu sous cet angle, le passé dans lequel se déroule Mad Men s’apparente au «futur» de la science-fiction. C’est une version simplifiée de notre réalité où, par exemple, les hommes disent tout haut ce que les hommes d’aujourd’hui pensent tout bas à propos des femmes.

Ici, quand on fait de la télé se déroulant dans le passé, la reconstitution historique occupe souvent l’avant-scène. On tourne souvent en dérision la devise du Québec, «je me souviens». Mais je trouve qu’elle s’applique bien dans ce cas-ci. Au petit écran, on se souvient beaucoup. La télé, c'est notre mémoire collective.

En particulier, on fait beaucoup de biographies comme celle de René Lévesque et de la famille Lavigueur. C’est assez curieux comme tendance parce qu’on se prive ainsi de l’outil numéro un pour capter l’attention du téléspectateur: lui raconter une histoire surprenante.

Quand la série Les Lavigueur a commencé, tout le monde au Québec savait comment elle allait finir. Bien sûr, on ne connaissait pas tous les détails de la «vraie histoire». Mais on savait exactement où toute l’affaire s’en allait.

Est-ce que je suis le seul que ça dérange ? Chose certaine, ça n’a pas empêché la série de connaître un grand succès.

Est-ce qu’on aime se faire raconter des histoires qu’on connaît déjà?

23.11.08

Au sujet de la campagne électorale

Ce qui me frappe le plus dans le déroulement de la campagne électorale jusqu’à présent, c’est à quel point la candidature de Pauline Marois «passe dans le beurre». Pourtant, c’est un événement historique. C’est la première fois qu’on a la chance d’élire une femme au poste de premier ministre du Québec. Mais il n’est pas du tout question de ça dans la campagne.

Quand on compare avec la campagne présidentielle qui vient de se terminer, le contraste est frappant. Hillary Clinton deviendra-t-elle la première femme candidate à la présidence? Sarah Palin sera-elle la première femme vice-présidente ? Barack Obama deviendra-t-il le premier président noir ? L’Amérique est-elle assez ouverte pour élire une femme ou un noir à sa tête ? Ces questions-là on fait partie de la campagne et l’ont dramatisée. C’est parce qu’elles se posaient que la campagne a passionné le monde entier et a pris une dimension historique.

Je ne dis pas que Pauline Marois devrait baser sa campagne sur le fait qu’elle est une femme. Et je ne dis pas non plus que les journalistes devraient insister davantage là-dessus. Ces choses-là, c’est une affaire de réflexes collectifs. Les Américains ont le sens du drame. Et ils aiment se créer des héros. Nous, on dédramatise tout, même les occasions historiques. Et ça donne des élections plates.